© Micheline Weinstein
  
   
8 • Suite Journal
  ininterrompu par intermittence 2020
  
   
Extension des post-it en vrac
  
   
Ich will
  Zeugnis ablegen bis zum letzten
[Je veux témoigner
  jusqu’au dernier jour]
Victor
  Klemperer • Journal 1933-1947
  
 
  
 
15 juillet 2020
  
  1
     
Sur les écumeurs et les écumeuses
  
  
   
À Madame De L’Histoire
  
   
En cette veille de l’anniversaire de la rafle du
  Vel’d’Hiv, lors de laquelle la police française est venue me
  chercher bébé, ma mémoire ajoute ceci : en guise de remerciements de votre
  part, il a fallu que j’insiste pour que vous fassiez mention de ma traduction
  du livre de Bert Kok, « À la bonne adresse », dans les nouvelles culturelles de
  votre association. Et, ô surprise, le texte de qqs lignes publié à la
  va-vite était bâclé, truffé de fautes d’orthographe, de graphisme, de libellé.
  
   
Quant à la Lecture-Spectacle au théâtre de ce
  même petit livre, subventionné par La Fondation pour la Mémoire de la Shoah,
  dont j’ai fait l’adaptation et dont nous vous avions envoyé une invitation pour
  la première = nada,  paru nulle part dans le champ de vos préoccupations.
  
   
Non seulement nous sommes nés dans la
  Terreur, dépossédés de notre existence, de celle de nos proches, mais quand par
  miracle nous avons survécu - j’en décris les circonstances dans mon Journal… et
  nombre d’écrits depuis 53 ans, sans manquer de souligner ma reconnaissance aux
  êtres humains et réseaux remarquables de tous horizons qui ont bravé le danger,
  se sont mobilisés pour qu’il advienne -, mais en ces temps de piratage passé
  dans les mœurs publiques, nous sommes dépossédés de la mise en œuvre de notre
  pensée singulière.
  
   
Je passe sur les originaux que j’avais confiés
  au Museum de W., justement grâce à votre élégante attitude, et dont vous vous
  êtes empressée de lui en demander une copie pour l’utiliser à votre profit sans
  même me le signaler, je vous avais proposé de le faire, mais alors il aurait
  fallu mentionner mon nom dans l’expo sur les camps du sud de la France… C’est
  moche, tout ça, Madame De L’Histoire.
  
W. 
  
   
To Madame De L’Histoire
  
   
On the eve of the anniversary of the Vel’ d’Hiv raid, for which the French police came to get me as a baby, my memory adds this :  By way of thanks from you, I had to insist that you mentioned my translation of
  Bert Kok’s book, « À la bonne
  adresse », in the cultural news of your organization. And to my surprise,
  the few lines of that published text were riddled with spelling mistakes, graphic errors and wording errors.
  
  
As for the Reading-Performance at the theatre of this same little book, funded by the Foundation for the
  Memory of the Shoah, which I adapted and for which we had sent you an invitation for
  the premiere = nada ! it appeared nowhere in the scope of your concerns. 
  
We were born in Terror, dispossessed of our existence, of that of our beloved. By some miracle some of us survived. I have described the circumstances in my Journal...
  and many writings over the past 53 years, and keep underlining my gratitude to the remarkable human beings and networks of all walks of life who have braved the danger, mobilized to make it happen.
  But in these times of piracy past in public mores, we are now robbed of the implementation of our singular though.
  
I’ll pass over the originals which I had entrusted to the W. Museum, precisely because of your elegant attitude.
  You hastened to ask for a
  copy, using them for your own benefit without even notifying me.
  I had offered that you do so,
  but you should then have had to mentioned my name in the exhibition on the South French camps... It’s ugly, all that, Madame De
  L’Histoire. 
  
  
5 août 2020
 
  2
 
  
Onfray • Point de vue d’historiens
  
 
Nous
  sommes, avec Élisabeth Roudinesco, de caractère différent, bref, pas des
  clones. Voilà qui est une chance pour nourrir vivant le dialogue. Cependant,
  des particularités nous sont communes, dont l’essentielle est le respect à la
  lettre du principe de laïcité, de sa loi de 1905.
  
Ainsi, nul
  besoin de dissimuler nos sources de références, recherches, investigations… Nul
  besoin de hacker.
  
Tombant vers
  la mi-juillet au hasard de la lecture d’un quotidien de presse fameux sur, de
  nouveau, un long entretien entre un journaliste et Michel Onfray,
  que je nomme depuis 13 ans Monsieur-J’ai-Tout-Lu, quand
  je disais alors qu’il s’alimentait à toutes les mangeoires, je lui demande
  en vain d’en apporter les preuves. Qui peut, outre des infatués, se prétendre
  avoir tout lu ? 
  
Ainsi
  persiste-t-il à se plaindre de l’accueil fait à “son” Freud. En un verbiage
  diffamatoire, Freud aurait dédaigné de lire Nietzsche. Or Freud en possédait
  l’œuvre complète offerte par Rank, annotée de sa main, selon le témoignage de
  Silberstein en 1886, suite au mariage de Freud.
  
C’est
  alors que me reviennent en mémoire les remarques de Freud au sujet de Nietzsche.
  Quelques-unes éparses sont reproduites dans plusieurs de mes textes, dont l’une
    que j’ai intitulée « Diffamation » envers Freud - plus récemment envers
    Freud et Françoise Dolto -, au moment de la polémique sur le
    livre d’Onfray, à laquelle Élisabeth Roudinesco avait
  également répondu point par point ; une ultérieure dans « Psychanalystes
    en Cour ».
  
Rappelons
  également que le “ça”,
  le “sac à pulsions”, via la paternité nominale de Nietzsche
  que lui reconnaît Groddeck dans son Livre
    du ça, fut adopté par Freud.
  
Tout cela
  figure sur notre site, et ici, sur le PDF joint.
  
Suite à la
  lecture la semaine dernière des giries sans cesse ressassées d’Onfray, j’ai demandé à Élisabeth Roudinesco si elle
  connaissait un-e psychanalyste et/ou un-e philosophe en vue qui
    accepterait d’écrire, d’insister, sur les sophismes d’Onfray,
    dire que par définition ils sont erronés serait une tautologie.
  
Comme
  souvent, Élisabeth Roudinesco m’avait précédée. Voici le texte de son dialogue
  avec Guillaume Mazeau, mené par Gilles Gressani le 1er  juillet 2020, dans la
    revue Le Grand Continent.
  
https://legrandcontinent.eu/fr/2020/07/01/onfray-fin-de-partie/
  
 
ø
  
 
Citations de Freud
   
 Charge contre Freud d’un Onfray inculte qui affirme, entre autres stupidités, que
   Freud dédaignait Nietzsche, alors que Nietzsche est évoqué par Freud dans la
   longue correspondance qu’il entretint entre 1873 et 1938 et dont il isola en
   1923, via Groddeck, le concept de “ça” [Es, en allemand], géhenne des pulsions...
   
 
 
    
In « Lettres de jeunesse ». À Eduard
  Silberstein les 13 et 15 mars 1875
  
   
“Ainsi vivons-nous, allons-nous heureux”, bien qu’en 1873, à
  Strasbourg, Fried. Nietzsche, ait reproché cette
  citation à David Strauss comme un indice de philistinisme.
  
   
Lettre à
  Fliess du 1er février 1900
  
   
Je viens juste d’acquérir Nietzsche, où je m’attends à trouver des
  éléments de langage en faveur de ce qui me reste assez obscur, mais ne l’ai pas
  encore ouvert.
  
   
Sur l’histoire du mouvement
  analytique 1914
  
   
Je me suis refusé, de propos délibéré, le très grand plaisir que
  procure la lecture de Nietzsche, dans le but de n’être entravé par aucune sorte
  d’influence extérieure, lors du cheminement analytique des impressions reçues.
  Aussi devais-je être prêt - et le suis volontiers resté - à renoncer à toute
  espèce de revendication de priorité, dans chaque circonstance où la laborieuse
  investigation psychanalytique ne pouvait qu’entériner la vérité que le
  philosophe découvre par sa seule intuition.      
  
   
Autoportrait
  1925
  
   
Référence à Contribution
  à l’histoire du mouvement psychanalytique 1914
  
   
Quant à Nietzsche [...] dont les intuitions et le discernement coïncident
  fréquemment et de façon étonnante avec les découvertes laborieuses de la
  psychanalyse, je l’ai longtemps évité en raison, justement, de cela ; j’étais
  peu concerné par les questions de priorité, ce qui m’importait par contre,
  c’était de garder mon entière disponibilité d’esprit.  
  
   
«
  Contribution à l’histoire du mouvement psychanalytique » 1914
  
   
La psychanalyse est ma création […] Personne ne peut savoir mieux que
  moi [...] Chacun a le droit de penser
    et d’écrire ce qui lui plaît, mais n’a aucun droit de le faire passer pour
    autre chose que ce qu’il est réellement.
  
   
ø
  
   
À l’intention
  de “Mes chers et estimés collègues”, ainsi Freud les intitulait-il
  
   
Confinée dans ma niaise bulle, j’aurai passé
  des décades à ne pas prendre en compte le fait que deux générations de non
  transmission aux futurs enseignants par leurs didacticiens, ne savent pas ce
  que signifie le néologisme Psycho-analyse,
  modernisé par Jung en Psychanalyse,
  forgé par Freud, ne le lisaient pas. En France, grâce à nombre de
  psychanalystes eux-mêmes, à leur addiction aux médias, sans omettre les
  professeurs du secondaire, la psychanalyse s’est incarnée en Lacan soi-même.
  Non qu’ils aient eu “besoin d’un père”, comme le prophétisait Lacan, sans lequel
  la psychanalyse expirerait, mais bien d’un maestro de secte, que dans ma
  jeunesse, par analogie, j’associais au trust régenté par la Scientologie. Le terme de “psycho” est à peu près assimilé par
  tout le monde, voici donc la définition classique de celui d’analyse :
  
   
Définition
  de Analyse
  
   
Analyse • Action d’identifier dans une substance les éléments
  constituants et d’en déterminer la teneur. Opération par laquelle l’esprit
  décompose un ensemble constitué pour en déceler l’autonomie des parties, pour
  en apprécier mieux la congruence ou la finalité, ou simplement pour rendre
  accessible chacun de ses éléments.
  
   
C’est ainsi que, me semble-t-il, devant ce
  qu’il estimait être son reniement par ses dissidents, Freud, résumant la
  polémique orageuse des années 13-14 et suivantes, au sujet de l’attribution du
  nom de Psychanalyse, de même qu’à
  l’intitulé de Psychanalyste s’est
  adressé à eux en 1925 :
  
   
Autoportrait
  1925
  
   
Évoquant sa Contribution
  de 1914 à l’histoire du mouvement psychanalytique 
  
   
La critique traita Adler et Jung avec
  une grande clémence ; la seule chose que je pus obtenir fut qu’ils renoncent à
  nommer leurs théories Psychanalyse.
  
   
Adler
  et Jung le firent.